Le prochain projet de loi finances, préparé sous l’impulsion du nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu, s’annonce particulièrement dense pour les contribuables. Plusieurs mesures fiscales sont déjà à l’étude et pourraient avoir un impact direct sur l’impôt sur le revenu ou les avantages fiscaux dont bénéficient actuellement de nombreux ménages. Voici les cinq propositions majeures qui suscitent débats et inquiétudes autour d’une possible hausse des impôts dès l’année 2026.
Prolongation et transformation de la contribution des hauts revenus
Le gouvernement envisage de prolonger la fameuse contribution différentielle sur les hauts revenus. Cette mesure garantit aujourd’hui un taux d’imposition minimal de 20 % pour toute personne seule dépassant 250 000 euros de revenus annuels ou pour les couples gagnant plus de 500 000 euros. Réintroduite récemment par une majorité précédente, elle visait à limiter certaines formes d’optimisation fiscale permises par différents mécanismes dérogatoires.
À présent, il est question de transformer cette contribution en une taxe sur le patrimoine. Cela signifierait que l’assiette de calcul ne reposerait plus uniquement sur les revenus mais aussi sur la détention d’actifs importants. Ce changement accentuerait la pression fiscale sur les fortunes françaises, déjà soumises à l’impôt sur le revenu et à d’autres contributions sociales, tout en renforçant la lutte contre l’évasion fiscale.
- Maintien ou durcissement du plancher minimal d’imposition pour les contribuables fortunés
- Passage éventuel d’un calcul basé sur les revenus à une assiette patrimoniale élargie
Des mesures anti-optimisation contre les holdings familiales
Les holdings familiales utilisent divers leviers juridiques et fiscaux pour alléger leur charge fiscale, ce qui contribue parfois au déficit public lorsque les recettes diminuent. Repérées comme des vecteurs privilégiés d’optimisation avancée, elles pourraient faire l’objet de nouvelles règles limitant leur efficacité.
Ce virage viserait à restreindre certains montages permettant d’afficher un faible taux d’imposition, notamment grâce à la réorganisation des flux de dividendes ou à la transmission d’actifs entre membres d’une même famille via des sociétés spécifiques. La suppression d’abattements fiscaux et d’autres niches renforcerait également les recettes issues de ces structures.
L’encadrement attendu irait de pair avec des contrôles renforcés pour mieux surveiller les transmissions patrimoniales dissimulées derrière ces structures, marquant ainsi un tournant dans la lutte contre l’évasion fiscale intra-familiale.
Un tel changement induirait mécaniquement une hausse des impôts pour les détenteurs de capital familial, notamment ceux qui cherchaient jusqu’ici à lisser leur imposition à travers différents dispositifs. Si beaucoup y voient un moyen de garantir davantage d’équité fiscale, la mesure n’en reste pas moins synonyme d’augmentation inévitable des prélèvements pour plusieurs milliers de ménages concernés.
On peut également anticiper que la valeur ajoutée dégagée par ces entreprises serait plus lourdement taxée, tout comme les dividendes redistribués, provoquant indirectement un alourdissement de la fiscalité globale sur le secteur entrepreneurial familial. À partir de 2026, la suppression prévue de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères accentuera ces changements structurels puisque un nouvel impôt remplacera ce dispositif emblématique afin d’assurer le financement du service public de gestion des déchets.
Suppressions de réductions d’impôts et abattements pour les familles
Autre mesure redoutée : la suppression de réductions d’impôt concernant les frais de scolarité au collège et au lycée. Jusqu’à présent, chaque enfant inscrit en collège ouvrait droit à 61 euros d’allégement ; pour un lycéen, cela représentait 153 euros par an. Leur disparition priverait donc de nombreuses familles de ces avantages fiscaux qui faisaient office de bouffée d’air face à la hausse continue du coût de la vie scolaire.
Par ailleurs, des pistes ont été évoquées concernant la remise en question d’abattements fiscaux sur d’autres dépenses jugées non prioritaires. Ce resserrement des avantages actuels accentuerait la charge fiscale perçue, surtout auprès des classes moyennes disposant de plusieurs enfants étudiants. Parmi ces évolutions attendues, la fin de l’abattement fiscal de 10% pour les personnes retraitées aurait aussi des effets directs sur leur niveau de vie, expliquant pourquoi la suppression de cet avantage inquiète particulièrement les retraités à partir de 2026.
- Suppression des avantages existants pour les frais de scolarité (collège/lycée)
- Probable révision d’autres abattements utilisés par les familles avec enfants
Restriction ciblée de l’accès aux APL
Dans les documents transmis au Conseil d’État, figure également une limitation de l’accès aux aides personnalisées au logement (APL) pour les étudiants étrangers ainsi que pour les enfants des 20 % de foyers les plus riches. Jusqu’à présent, l’APL permettait d’atténuer sensiblement la charge locative pour ces publics variés.
Si ce filtrage entrait en vigueur, une frange importante d’étudiants et de jeunes issus de milieux favorisés perdraient cet appui financier précieux. Cette évolution traduirait une volonté du gouvernement de concentrer les efforts budgétaires sur les populations réellement modestes, quitte à risquer une hausse des impôts indirecte lorsque les parents doivent prendre le relais de l’aide supprimée.
- Réduction du périmètre des ayants droit selon le statut social ou la nationalité
- Diminution mécanique du pouvoir d’achat des foyers concernés
Des changements attendus pour les investisseurs et autoentrepreneurs
Deux catégories supplémentaires pourraient être pénalisées par le futur projet de loi finances : les particuliers investissant dans les PME via le dispositif Madelin et les gérants autoentrepreneurs soumis à la TVA.
Concernant les investissements, le gouvernement réfléchit à relever significativement les conditions d’obtention de la réduction d’impôt Madelin. Pour les autoentrepreneurs, la réforme du régime de TVA prévoit une harmonisation des seuils déclenchant le paiement de la taxe, mettant fin à l’exonération dès qu’un certain volume d’affaires est atteint.
Le dispositif Madelin constitue aujourd’hui un soutien majeur au financement des petites et moyennes entreprises ; toute modification restrictive diminuerait son attractivité, freinant la dynamique entrepreneuriale nationale. Quant à la réforme de la TVA, l’objectif affiché est de remédier aux inégalités créées par les différences de seuil selon l’activité. Mais cela risque d’entraîner une augmentation soudaine des charges pour de nombreux indépendants jusque-là dispensés de TVA, provoquant une hausse des impôts proportionnelle à leur chiffre d’affaires.
L’ensemble de ces mesures, déjà en discussion ou esquissées dans plusieurs rapports officiels, montre bien que chaque catégorie de contribuables doit rester attentive à la prochaine année blanche fiscale afin d’anticiper au mieux le retour du boomerang sur sa feuille de déclaration.