Dictée : seules les personnes nées avant 1970 arrivent à trouver cette faute d’orthographe cachée, « Ça en dit long sur ce qu’on apprend aux jeunes aujourd’hui »

Dans un collège de l’Essonne, une professeure a proposé à ses élèves un défi peu ordinaire. Elle leur a soumis une dictée datant de 1965, glissant volontairement une faute d’orthographe cachée dans l’emploi du subjonctif. Résultat ? Sur les 28 élèves de 3e, seul un adolescent a su identifier l’anomalie grammaticale au cœur du texte. Cette expérience relance le débat sur le niveau en orthographe en France et met en lumière le fossé générationnel qui subsiste entre les natifs d’avant 1970 et les jeunes générations.

Pourquoi ce test met-il en lumière les différences entre générations ?

Le scénario est frappant : alors que la quasi-totalité des adolescents peinent à débusquer l’erreur cachée, beaucoup d’adultes des générations précédentes y parviennent instantanément. Nombreux sont ceux nés avant 1970 ou même juste avant 1980 qui se disent déconcertés face à la méconnaissance actuelle du subjonctif. Leur formation scolaire mettait l’accent sur la rigueur grammaticale, avec des exercices fréquents et des dictées exigeantes.

L’écart qui se creuse s’explique notamment par les méthodes employées à l’école il y a quelques décennies. À cette époque, les cours de français multipliaient les rappels systématiques des conjugaisons et imposaient des listes de mots à apprendre par cœur. Aujourd’hui, les approches diffèrent nettement : elles privilégient davantage le contexte et la compréhension globale, laissant parfois de côté la technique pure du maniement de la langue française.

Comment expliquer le recul du niveau en orthographe chez les jeunes générations ?

Plusieurs facteurs contribuent au déclin du niveau d’orthographe. Selon diverses études, près de 90 % des élèves de CM2 faisaient plus de quinze fautes lors d’une dictée en 2021, contre seulement 33 % en 1987. Ce chiffre interpelle et signale une mutation profonde dans la manière d’apprendre et de pratiquer la langue écrite en milieu scolaire.

Ce phénomène s’explique en partie par la disparition d’un enseignement axé sur l’apprentissage minutieux des règles grammaticales. Depuis 1968, plus de 500 heures de français ont disparu des programmes scolaires. Le recul n’affecte pas seulement les élèves : certains futurs enseignants rencontrent aujourd’hui de grandes difficultés avec des notions comme le subjonctif imparfait ou la concordance des temps, signes d’un affaiblissement généralisé des bases linguistiques. Par ailleurs, on constate que lors de tests inspirés de ceux proposés autrefois, comme l’a montré une classe de collégiens, rares sont les jeunes qui détectent correctement la moindre erreur, contrairement à leurs ainés.

Vers une pédagogie moins structurée ?

Les méthodes contemporaines privilégient un apprentissage jugé plus contextualisé. Plutôt que d’imposer des séries de dictées ou des pages entières de verbes à conjuguer, l’accent est mis sur la compréhension globale et le sens du texte. Si cette approche encourage la créativité, elle laisse néanmoins de côté l’automatisme qu’offraient autrefois l’écriture fréquente et la répétition des règles.

La conséquence directe est une diminution de la capacité à détecter rapidement la moindre faute d’orthographe. Beaucoup de jeunes développent ainsi une relation intuitive, plutôt qu’analytique, avec l’écrit, ce qui complique la maîtrise de subtilités telles que l’accord du subjonctif ou les exceptions du participe passé.

Même les tests simples deviennent des défis

Pour nombre d’élèves, une simple dictée de niveau brevet représente désormais un véritable obstacle. Les erreurs récurrentes touchent autant l’orthographe lexicale que la grammaire et la conjugaison. Les spécialistes s’inquiètent de voir l’emploi correct du subjonctif tomber dans l’oubli, alors qu’il reste indispensable pour bien rédiger certains textes argumentatifs ou littéraires.

Claudine M., ancienne correctrice du brevet, souligne que cette évolution modernise certes l’approche pédagogique, mais fragilise parfois les bases linguistiques. Repérer l’anomalie cachée lors d’un exercice type relève aujourd’hui d’un vrai défi, loin des automatismes acquis par les personnes nées avant 1970.

Quelle place pour la dictée et les exercices traditionnels dans l’éducation actuelle ?

Face à ce bilan mitigé révélé par ces expériences intergénérationnelles, une question persiste : faut-il revenir à des pratiques plus traditionnelles, éprouvées par les personnes nées avant 1970 ? La dictée revient régulièrement dans les recommandations des experts pour enrayer le recul du niveau en orthographe.

Cet exercice développe l’attention au détail, affine la rapidité d’analyse et habitue à reconnaître immédiatement une faute d’orthographe ou une anomalie subtile, comme celle liée à l’emploi du subjonctif. Les générations formées grâce à ces méthodes semblent mieux armées pour déceler ces pièges, tandis que les jeunes actuels apparaissent désavantagés lorsque survient un tel test.

Des solutions concrètes pour réduire le fossé générationnel

Pour inverser la tendance, plusieurs propositions émergent : multiplier les dictées, instaurer des lectures régulières, diversifier les formes d’écriture, réintroduire un enseignement exigeant de la grammaire dès le primaire et former les enseignants selon des principes plus stricts. Ces axes visent à renforcer les compétences et à combler progressivement les lacunes observées chez les ados.

Bâtir des ponts plutôt que de creuser davantage le fossé générationnel passe aussi par la valorisation du travail acharné et de la pratique quotidienne de la langue française. Inciter chaque élève à relever le défi d’une dictée complexe nourrit l’ambition de retrouver une maîtrise plus sûre de l’orthographe, tout en respectant l’évolution des pratiques pédagogiques.

Que disent les statistiques actuelles sur le déclin ?

Le choc des générations se lit aussi dans les chiffres. Aux nombres déjà cités s’ajoutent des enquêtes montrant que l’écrasante majorité des élèves avouent ne jamais faire de dictée en dehors des examens obligatoires. Même les adultes actifs, sauf ceux nés avant 1980, confessent souvent un malaise devant des règles complexes ou l’usage passé du subjonctif.

Certains établissements tentent toutefois de tirer des leçons positives de ce constat inquiétant. Le retour progressif des dictées courtes, associées à des corrections collectives bienveillantes, redonne confiance aux élèves sans stigmatiser leurs faiblesses et amorce un changement favorable au sein des classes.

  • Revaloriser la dictée hebdomadaire au collège et au lycée
  • Introduire des lectures variées dès l’école primaire
  • Rendre obligatoire un module complet dédié au subjonctif et à la conjugaison
  • Sensibiliser enseignants et élèves aux enjeux de la maîtrise écrite
  • Évaluer fréquemment le progrès via des tests adaptés au niveau en orthographe de chaque classe
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