Dans une salle de classe du collège, un exercice anodin a récemment suscité de vifs débats. Une professeure en Essonne a proposé à ses élèves de troisième une dictée datant de 1965, y glissant volontairement une faute d’emploi du subjonctif. Sur 28 collégiens, un seul a réussi à détecter la faute d’orthographe. Parmi les adultes de la génération née avant 1970, l’erreur sautait aux yeux. Ce simple test met en lumière un fossé générationnel impressionnant et soulève des questions sur ce qu’on apprend aux jeunes générations aujourd’hui.
Comment une dictée peut révéler un fossé générationnel ?
La dictée donnée dans ce collège ne relevait pas d’un défi ordinaire. Provenant d’une époque où la rigueur orthographique était au cœur de l’enseignement, elle incluait une subtilité grammaticale que peu de jeunes reconnaissent encore : l’emploi juste du subjonctif. Constater qu’une seule personne parmi presque trente identifie cette faute d’orthographe suggère que certaines notions autrefois fondamentales s’effacent du bagage scolaire actuel.
Pour la génération née avant 1970, ces règles paraissent naturelles, mémorisées presque instinctivement durant l’enfance. L’expérience prouve qu’un simple exercice peut offrir, au-delà de son aspect ludique ou scolaire, une véritable comparaison intergénérationnelle sur le niveau scolaire et les évolutions méthodologiques qui ont transformé l’enseignement du français.
Pourquoi la génération née avant 1970 est-elle plus à l’aise avec les anciennes règles ?
Jusqu’au début des années 80, la dictée jouait un rôle central dans l’éducation. Les manuels détaillaient longuement chaque point de grammaire et les erreurs étaient analysées individuellement. Pour beaucoup d’adultes ayant fréquenté l’école durant ces années, le subjonctif imparfait ou les accords complexes faisaient partie intégrante des contrôles réguliers. Repérer une erreur cachée dans un texte semble alors instinctif pour ceux habitués à la moindre subtilité du langage écrit.
Ce contraste éclate lorsque ces personnes comparent leurs expériences scolaires aux méthodes actuelles. Non seulement les exercices sont moins axés sur la correction détaillée des fautes, mais la remise en question de l’autorité des règles rend l’acquisition de certains réflexes grammaticaux beaucoup moins systématique chez les jeunes générations. D’ailleurs, l’évolution des cadres éducatifs génère parfois des tensions qui rappellent d’autres bouleversements récents dans l’organisation scolaire, comme le montrent certaines situations conflictuelles telles que des litiges entre propriétaires et occupants, à l’exemple de décisions judiciaires concernant des squatteurs et leur impact.
Qu’est-ce que cela révèle sur l’évolution de l’éducation ?
L’écart constaté par ce test souligne l’impact des réformes successives de l’éducation nationale. Depuis 1968, les heures consacrées à la langue française ont diminué sensiblement : plus de 500 heures perdues lors des parcours scolaires depuis ce temps. Parallèlement, des approches dites modernes ont favorisé une pédagogie centrée sur le contexte et moins sur la répétition des règles pures. Les textes longs, les lectures approfondies et les analyses grammaticales décortiquées laissent peu à peu place à une pratique orale ou à des ateliers thématiques.
Il en résulte forcément une perte d’expertise sur certaines subtilités de la langue écrite. Même chez les futurs enseignants, les spécialistes observent d’inquiétantes lacunes. L’exemple frappant de la dictée en question fait office de révélateur : le niveau d’orthographe fluctue clairement en fonction des époques et des méthodes choisies pour l’apprentissage.
Le niveau d’orthographe en chiffres : un déclin avéré ?
Les statistiques recueillies confirment ce ressenti collectif autour d’une baisse généralisée des compétences orthographiques. En 2021, environ 90 % des élèves de CM2 commettent plus de quinze fautes lors d’une dictée standardisée. À titre de comparaison, ils n’étaient que 33 % à franchir ce seuil en 1987. Ces chiffres témoignent sans détour d’un changement majeur dans la façon dont la langue française est maîtrisée à l’école primaire.
L’apparition de nouvelles méthodes et l’écartement progressif de la dictée traditionnelle contribuent à expliquer cet écart statistique entre générations. Là où les parents — voire les grands-parents — entraînaient leur plume sur des bancs souvent stricts, les enfants évoluent aujourd’hui dans un environnement scolaire bien différent, où les règles s’interprètent parfois plus qu’elles ne se récitent.
Quels facteurs expliquent cette chute du niveau scolaire ?
Plusieurs éléments entrent en jeu pour comprendre ces écarts. D’abord, la réduction du temps consacré à l’étude du français dans les plannings hebdomadaires fragilise constamment l’exposition des jeunes aux exercices structurants. Moins de dictées, moins de lectures dirigées et moins de corrections collectives entraînent inévitablement une moindre restitution des compétences de base.
À cela s’ajoute l’abandon progressif de l’enseignement pur de la grammaire. Alors que la génération née avant 1970 naviguait chaque semaine entre conjugaison, analyse logique et identification précise des différentes propositions, les classes actuelles préfèrent souvent explorer des projets transversaux ou favoriser la créativité littéraire. Même si ces évolutions enrichissent en partie les parcours, elles diluent parfois l’attachement aux détails formels qui caractérisaient autrefois la maîtrise du français écrit.
Que pensent les spécialistes de ce phénomène ?
Des linguistes chevronnés, des enseignants retraités et même des correcteurs professionnels partagent un diagnostic assez unanime. Comme Claudine M., ex-correctrice du brevet, beaucoup regrettent que la familiarité avec le subjonctif ait quasiment disparu chez les jeunes générations. Ils précisent que les bases solides acquises dès le départ restent irremplaçables pour progresser sereinement vers les difficultés supérieures du programme.
Selon eux, il serait judicieux de réintroduire rapidement plusieurs outils éprouvés afin d’aider les élèves à combler leurs lacunes actuelles. Les recommandations insistent notamment sur un retour régulier à la dictée, allié à des séances de lecture fréquentes et à la redécouverte active des fondements grammaticaux oubliés.